
L’annonce a fait l’effet d’un électrochoc dans le monde du luxe : Luca de Meo, jusqu’ici patron de Renault, sera le nouveau directeur général de Kering à compter de septembre 2025. C’est la première fois qu’une figure de l’automobile prend les rênes d’un géant du luxe, maison-mère de Gucci, Yves Saint Laurent, Bottega Veneta, Balenciaga ou encore Boucheron. La nouvelle, officialisée le 16 juin, a été saluée par les marchés financiers : l’action Kering a bondi de près de 12 %, tandis que le titre Renault chutait dans le même temps – signe de la confiance placée par les investisseurs dans ce choix audacieux et de l’aura de « sauveur » prêtée à Luca de Meo. François-Henri Pinault, désormais uniquement président, cédera la direction exécutive qu’il tenait depuis 2005. La séparation des fonctions de président et de directeur général marque un renouvellement de gouvernance salué comme une étape majeure, et symbolise l’entrée de Kering dans une nouvelle ère.
Si Kering opte pour un dirigeant venu d’un univers aussi éloigné que l’automobile, c’est que le contexte est critique. Le groupe traverse depuis deux ans des turbulences sérieuses : sa marque phare Gucci est en perte de vitesse et voit ses ventes s’effondrer. Or Gucci représente près de la moitié du chiffre d’affaires de Kering et environ deux tiers de son résultat opérationnel. Une dépendance extrême qui rend cette contre-performance d’autant plus lourde de conséquences. Le chiffre d’affaires consolidé de Kering a reculé de 14 % au premier trimestre 2025, creusant l’écart avec des concurrents comme LVMH ou Hermès. En Bourse, la capitalisation de Kering a fondu de plus de 60 % entre 2021 et 2025, ne valant aujourd’hui qu’une fraction de ses rivaux. Longtemps numéro deux du secteur, Kering est désormais clairement distancé. Endetté par une série d’acquisitions récentes et confronté au ralentissement du luxe en Chine et aux États-Unis, le groupe voit son modèle ébranlé. Son organisation interne, longtemps jugée perfectible, ne tient plus dans un environnement devenu plus exigeant. Aucun candidat en interne n’ayant été jugé capable d’assurer une relance d’ampleur, la décision a été prise de chercher un profil externe capable d’apporter un œil neuf.

Luca de Meo est un nom respecté dans l’univers automobile. Italien, 58 ans, diplômé de Bocconi à Milan, il possède trois décennies d’expérience dans le secteur. Il s’est illustré dans la relance de marques en difficulté : chez Fiat, il participe au retour en grâce de la 500 ; chez Seat, il lance Cupra, et surtout, à la tête de Renault depuis 2020, il conduit un redressement spectaculaire à travers le plan Renaulution. Sous sa direction, Renault enregistre des résultats historiques malgré un contexte défavorable. Son approche stratégique, son sens du marketing, et sa capacité à redonner un cap à des groupes complexes font de lui un profil rare. Il est aussi connu pour savoir composer avec des actionnaires puissants, ce qui laisse augurer une bonne relation avec la famille Pinault. Son origine italienne est perçue comme un atout supplémentaire : de nombreuses marques clés du groupe Kering (Gucci, Bottega Veneta, Brioni, Pomellato) partagent cette culture.
Le choix de Luca de Meo marque une rupture dans le paysage du luxe. C’est la première fois qu’un dirigeant issu de l’industrie automobile prend les commandes d’un groupe aussi emblématique. Ce mouvement rappelle d’autres paris risqués dans le passé, mais très rares à ce niveau. Il s’agit d’introduire une logique plus industrielle, plus structurée, dans un univers dominé par la créativité et le marketing

émotionnel. De Meo ne viendra pas dicter l’esthétique des collections, mais il aura pour mission d’assainir l’organisation, de simplifier les processus, de relancer les performances financières et d’accélérer l’intégration des nouvelles activités du groupe comme Kering Beauté ou le rachat de Valentino. Il devra aussi gérer une dette en hausse et une image à redéfinir. Sa priorité immédiate sera bien sûr Gucci, mais sans négliger les autres marques du portefeuille, y compris celles liées à la joaillerie et à l’horlogerie.
Car au-delà de la mode, Kering conserve des atouts précieux dans la haute joaillerie et les montres, à commencer par Boucheron. L’arrivée d’un dirigeant formé à l’exigence technique et à la maîtrise industrielle pourrait favoriser des synergies intéressantes entre ces univers. L’avenir dira si Luca de Meo réussira à redonner à Kering le lustre qu’il a perdu, mais ce pari symbolise une volonté claire : tourner la page de la stagnation et repartir à l’offensive, avec une vision plus structurée, plus disciplinée, et sans doute plus lisible pour les marchés.
Chez Osterman Watch, on suivra avec attention les premiers pas de Luca de Meo dans le monde du luxe, où chaque décision peut changer la perception — et parfois même, la valeur — d’une marque.
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